Contrôle des comptes des délégations de service public par l’opposition

Bien que ce soit une obligation légale depuis avril 2020, la plupart des collectivités territoriales ayant plus de 75 000 € de recettes de fonctionnement (= toutes les communes de plus de 1 000 habitants par exemple) n’ont jamais créé leur « Commission de contrôle financier ». S’agissant d’une commission légalement obligatoire, même un élu d’opposition peut imposer sa création à sa commune ou à son intercommunalité.

  • Il s’agit d’une « Commission de contrôle des comptes détaillés des opérations de toute entreprise liée à la commune par une convention financière comportant des règlements de compte périodiques» (voir articles R2222-3 R2222-1 et R2222-6 du CGCT). Il ne s’agit donc pas d’une simple « Commission des finances » de la collectivité.
  • Cette commission doit contrôler les comptes de toutes les entreprises en délégation de service public de la Mairie, des entreprises lui versant des redevances, des entreprises lui rendant des comptes réguliers, des SEM ou des SPL ayant un contrat avec la Mairie, ainsi que celles bénéficiant de ses garanties d’emprunt (cela concerne aussi les sous-traitants et filiales impliquées). Comme l’a précisé la Direction Générale des Collectivités, cette commission a un rôle spécifique qui n’est pas celui des CCSPL (Commission consultative des services publics locaux) obligatoires à partir de 10 000 habitants, les CCSPL se préoccupant plutôt, elles, de la qualité des services publics locaux.
  • Cette Commission doit pouvoir se déplacer sur place, au sein des entreprises (ou le déléguer à des organismes accrédités), pour vérifier le détail des comptes, c’est-à-dire vérifier bien plus que l’étude annuelle des rapports des délégataires présentés en Conseil municipal. Elle peut par exemple exiger des éléments détaillés sur les « frais de siège » qui sont parfois fourre-tout… Elle peut contrôler si les calculs très complexes de ré-évaluation annuelle des tarifs de l’eau, par exemple, sont parfaitement appliqués, ou s’il n’y a pas de passe-droits pour certains usagers. Ou encore si une redevance versée à la commune a bien été rigoureusement calculée, etc… Et cela permet à une collectivité de repérer des éléments à améliorer, à mieux préciser, pour ses futurs nouveaux contrats de délégation de service publics, dans ses domaines délégués qui peuvent concerner les transports, l’eau, le stationnement payant, les marchés, etc…
  • La loi laisse toute marge au Conseil municipal pour sa composition.  Or la seule obligation légale pour la composition des commissions créée par vote du conseil municipal, c’est le principe de la proportionnalité du  CGCT afin que toutes les tendances représentées au conseil municipal soient présentes… Ce qui  dans les communes de plus de 1 000 habitants qui créée cette commission, on y retrouve le plus souvent des élus d’opposition (article L2121-22 du CGCT).
  • Liens vers la note détaillée de la Direction Générale des Collectivités Territoriales sur ces commissions de contrôle financier (20 pages) : Première partie & Deuxième partie

    NOTE DE L’AELO : Si cette commission n’a pas été créée dans votre commune en début de mandat avec les autres commissions (à l’heure actuelle moins de 5 % l’ont créée), vous pouvez donc demander à votre Maire qu’il respecte la loi et les recommandations des Chambres Régionales des Comptes, en exigeant officiellement la mise à l’ordre du jour de la création de cette Commission de contrôle de dépenses d’argent public, en vertu du droit de proposition dont tout élu dispose (voir notre question sur votre droit de proposition). Ainsi vous imposerez publiquement à votre Maire de collaborer avec son opposition.

      • En cas de refus du Maire, sachant que c’est une obligation légale du CGCT, un recours simple au Préfet doit suffire, sans avoir à aller jusqu’au Tribunal Administratif.
      • Mais l’utilisation politique de son refus peut éventuellement vous intéresser en soulevant les questions suivantes  : « Mais qu’y a-t-il à cacher dans ces comptes ?… », « Comment peut-il exiger de ses concitoyens le respect des lois quand lui-même ne les respecte pas sur un point si important : le contrôle de notre argent public ? », etc…

– Publié le 21/04/21

– Mis à jour le 09/06/23 & le 25/03/24

Questions similaires

Vos formations financées par votre collectivité : quels sont vos droits depuis le 02/11/21 ?2024-03-27T11:22:05+01:00

La note que vient de publier la Direction Générale des Collectivités Locales, sous l’égide du Ministère, pourra être utile à bien des élus d’opposition qui se voient abusivement refuser des financements de formation par leur Maire. Ils pourront en effet puiser dans ces 6 pages des consignes officielles qui s’imposent désormais à toutes les Mairies. Vous la retrouverez intégralement en fin d’article, avec les extraits vous intéressant pour argumenter auprès d’un Maire récalcitrant (extraits surlignés par l’AELO pour ses adhérents).

En effet, on peut y lire textuellement :

–  » Sous réserve du respect des procédures liées à la dépense publique, la collectivité ne peut donc pas refuser le bénéfice d’une formation à un élu qui formulerait une demande en ce sens.  »

–  » La jurisprudence a consacré le principe selon lequel chaque élu est libre de se former auprès de l’organisme de son choix… indépendamment des décisions (de formation) prises par sa collectivité  »

– Le Maire peut refuser de financer une formation si l’organisme n’est pas agréé ou si la formation n’est pas en lien avec l’exercice du mandat, mais la note précise que selon la jurisprudence, le Maire ne peut refuser une formation : 

–  » au motif de l’appartenance politique de l’élu ayant formulé la demande  » (par exemple : appartenance à un groupe de la minorité…)

–  » au motif qu’un autre organisme de formation proposait une formation à un prix inférieur (dès lors que la formation souhaitée n’a pas un coût excessif et que le plafond de 20% n’est pas dépassé*)  »

–  » au motif que le stage ne correspond pas exactement aux fonctions particulières des élus ou de leur appartenance à une commission en particulier  »

–   » au motif que le montant des crédits inscrits au budget prévisionnel est insuffisant, dès lors que la dépense liée à la formation ne conduirait pas à dépasser le plafond de 20%  » (de l’enveloppe indemnitaire annuelle globale des élus*)

Ce dernier point est essentiel, vu le nombre incalculable de fois où des élus d’opposition se sont vu refuser le financement de leur formation par leur Maire, au motif qu’il n’y avait « plus assez de budget formation d’élus »… Car c’est légalement une dépense obligatoire des communes et si le budget prévisionnel est dépassé, une délibération modificative budgétaire doit impérativement être votée !

La note de la DGCL précise parallèlement que tout élu demandeur d’un financement de formation par sa collectivité devra adresser au préalable la demande à son Maire ou son Président d’intercommunalité, accompagnée du devis et du descriptif de la formation, afin que ce dernier donne formellement un accord de financement et signe un contrat avec l’organisme de formation avant celle-ci.

Pour ce qui est des délibérations à adopter, la note rappelle l’obligation pour les collectivités de délibérer en début de mandat (ce qui n’était pas toujours fait…) au sujet des modalités prévisionnelles des formations d’élus financées par la Mairie ou l’interco, et elle précise que les collectivités qui utiliseront la possibilité de compléter le financement du DIF-élus pour une formation, à partir du 1er janvier 2022, devront en préciser les conditions par délibération (pour connaître vos droits à formation du DIF-élus, voir notre article ci-lié).

Enfin précision importante, à partir de la publication par le Ministère du répertoire officiel des thèmes de formation destinés aux élus (« courant 2022 »), les collectivités ne pourront plus financer de formations non inscrites dans ce répertoire.

* La note (en lien ci-dessous) précise en page 3 les modalités de calcul de cette enveloppe indemnitaire annuelle, qui peut être supérieure à la totalité des indemnités réellement perçues chaque année par l’ensemble des élus de la collectivité. (suite…)

Avez-vous droit à l’affichage libre dans votre commune ?2023-02-01T10:19:49+01:00

Faisons le point sur cet “affichage libre” auxquels tous les élus d’opposition doivent avoir légalement accès en toute période, dans toutes les communes de France. (suite…)

Comment consulter les listes électorales ?2023-10-30T18:57:09+01:00

Il est tout à fait possible d’avoir communication des listes électorales de sa commune, ou des communes de son département, et d’en obtenir une copie (article L37 du Code Electoral). Vous pourrez l’obtenir au choix de votre Mairie ou bien de votre Préfecture.

Il est préférable de vous renseigner au préalable pour savoir sur quel support cela vous sera communiqué, l’intérêt pour plus de souplesse d’étude de la liste obtenue sera de l’avoir en format Xcel. On peut souvent l’obtenir dans ce format-là en s’adressant aux Préfectures.

Si la copie de la liste vous est remise ou adressée sur papier ou sur clé USB, le support peut vous être facturé à prix coûtant, la consultation sur place restant gratuite.

Il vous faudra par ailleurs impérativement présenter votre pièce d’identité, pour vérification que vous êtes bien inscrit sur la liste électorale, et faire une demande écrite précisant que vous vous engagez à ne pas faire un usage commercial de la liste électorale.

À noter : les cahiers contenant les feuilles d’émargement des scrutins, bien que basés sur les listes électorales, ne sont pas eux des documents communicables à tout électeur qui en fait la demande. Ils présentent la particularité de n’être consultables en Préfecture que dans la semaine qui suit un scrutin, car ils contiennent des « données personnelles » protégées par le RGPD (on sait qui est venu voter ou pas). Mais ils doivent pouvoir être consultables pendant la courte période où l’on peut déposer un recours électoral pour vérifications.

  • Publié le 30/10/23
À partir de quel seuil une démission collective entraine une nouvelle élection municipale ?2024-03-22T16:51:07+01:00

Il y a 2 seuils à considérer, car ce seuil change dans la dernière année civile précédant le renouvellement national de tous les conseils municipaux (c’est-à-dire pour ce mandat : à partir du 1er janvier 2025).

Ensuite, les conséquences sont différentes selon que l’on soit dans une commune de plus ou moins de 1 000 habitants.

Le principal seuil à considérer est donc celui du tiers des sièges du conseil municipal qui doivent se trouver vacants du fait de démissions ou de décès, c’est le seuil déclenchant automatiquement dans les trois mois une nouvelle élection municipale partielle (communes de moins de 1 000 habitants) ou complète (communes de 1 000 habitants ou plus). Attention : sièges vacants, cela veut dire qu’il n’y plus personne, sur la liste de candidats aux élections municipales de début de mandat, pour remplacer les élus démissionnaires, ou que tous les suivants de liste des démissionnaires ont officiellement écrit au Maire pour lui signifier qu’ils refusaient d’entrer au conseil municipal. Le remplacement d’un élu ne peut se faire que par un élu de la même liste. Une élection municipale partielle est également déclenchée si le conseil municipal ne compte plus que moins de 5 membres dans les communes de moins de 1 000 habitants.

Ce seuil du tiers des sièges vacants passe à la moitié des sièges vacants au 1er janvier de l’année qui précède l’année du renouvellement national des conseils municipaux et le seuil des 5 membres du conseil passe à 4.

Dans tous ces cas, les membres du conseil municipal non démissionnaires, dont en général le Maire, restent en place jusqu’à la nouvelle élection, convoquée par le Préfet, pour gérer les affaires courantes.

Communes de moins de 1 000 habitants (art. L258 du Code électoral ci-lié) :

On ne procède alors par élection qu’aux remplacements des sièges vacants. La loi est telle – une conception curieuse de la démocratie… – qu’on peut voir des communes où seul le Maire n’a pas démissionné et où il se retrouve ensuite avec une majorité d’opposants en face de lui, en pouvant tout à fait se maintenir à son poste de Maire jusqu’à la fin du mandat !

Communes de 1 000 habitants et plus (art. L270 du Code électoral ci-lié) :

L’élection qui s’ensuit est complète, dans les mêmes conditions exactement que l’élection municipale de début de mandat, avec une nouvelle élection du Maire et des adjoints dans la semaine qui suit le scrutin.

– Publié le 22/03/24

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