1) Pouvez-vous nous présenter votre commune en quelques mots ?
Je suis élue à Trets, ville médiévale de 11 000 habitants, dans les bouches du Rhône, chef-lieu du canton et de la Haute Vallée de l’Arc, au sud de la Montagne Sainte Victoire, au pied du mont Olympe. Entre Aix-en-Provence et St Maximum de la Sainte Baume, à 40 km de Marseille.
2) Qu’est-ce qui vous a amenée à vous présenter pour siéger au Conseil municipal ?
- L’urgence d’une indépendance alimentaire minimale et la sauvegarde des terres agricoles. Mon engagement est parti de la découverte de 15 hectares de terres agricoles communales à côté de la cuisine centrale qui prépare presque mille repas quotidiens pour nos écoles et notre restaurant municipal. Notre équipe avait le projet de faire une régie agricole. Malheureusement nous n’avons pas été élus et ces terres ne profitent pas à l’approvisionnement de nos cantines. Il est urgent de produire localement et de rediversifier les cultures. Il s’agit là de terres communales, un bien collectif qui doit profiter à la collectivité, à nos enfants.
- Le fait de voir la nature se dégrader. Dans mes différents postes, j’ai quotidiennement évalué les pollutions (rivières, fleuves, air, mer, forêts, fossés, etc.). Tout est contaminé mais le pire c’est que cela continue et s’aggrave, avec les effets cumulatif et cocktail (des petites doses en dessous d’une norme finissent par créer une dose au-dessus de la norme et des molécules non toxiques mélangées génèrent un mélange toxique). Je suis lasse d’entendre que l’on ne peut rien faire. Nous devons cesser ce qu’il est très facile de cesser immédiatement : le gaspillage et l’insouciance. Beaucoup de nos pratiques sont incohérentes. Nous allons acheter notre pain en voiture à quelques kilomètres puis nous nous enfermons dans un hangar pour pédaler sur des vélos immobiles.
- Le fait d’être mère et même si je n’ai jamais eu aussi peu de temps disponible, de me sentir responsable de l’avenir de ma petite fille. La qualité de la nourriture dans les écoles est médiocre. Les critères drastiques d’hygiène imposés dans le but d’éliminer tout risque sanitaire à très court terme ont reporté les risques sanitaires à long terme, c’est alors le seul consommateur qui en paie les conséquences. Les normes d’hygiène alimentaire sont liées au transport, à la conservation et aux superproductions, et non aux petits producteurs locaux ou artisanaux qui se retrouvent drastiquement contraints à des normes imposées qui les ont tout simplement anéantis. Les marchés publics doivent les soutenir et retrouver du bon sens, remettre de la qualité dans les assiettes.
- Le fait d’être ingénieure en agroalimentaire et biotechnologies, spécialisée dans l’eau et la dépollution et de réaliser depuis des décennies l’inertie des politiques clientélistes, qui vont privilégier des intérêts privés particuliers au détriment de la collectivité et des générations futures, ainsi que le déni des citoyens qui se désintéressent de la politique et se retrouvent lésés puisqu’il s’agit de gestion d’argent public. Tout se paie un jour, et le prix de la dépollution est gigantesque. Il est profondément injuste que les pollutions perdurent et soient laissées à la charge de nos enfants. Je suis en colère que rien ne bouge, que les gens qui ont des enfants privilégient encore leur confort, leurs habitudes, leur incohérence… Tout ce que nous continuons à gaspiller ne leur sera jamais rendu.
3) Comment le Maire et sa majorité respectent vos droits d’élus minoritaires ? Le cas échéant, qu’avez-vous entrepris pour un meilleur respect de ces droits ?
Le maire et sa majorité respectent à minima le droit des élus minoritaires. Nous n’avons aucune indemnité bien qu’il ait été demandé une égalité de traitement avec les autres conseillers municipaux, afin de payer aux moins nos frais de déplacement et communication. Demander des indemnités est considéré comme cupidité, ce qui est hypocrite dans un système qui finalement favorise le clientélisme et les intérêts particuliers. C’est ainsi que la politique a mauvaise image. Trop d’élus sont mis en examen. Personnellement je vais jusqu’à penser que les élus ont trop de pouvoir et qu’il faudrait au moins un examen d’aptitude pour exercer les fonctions. Les élus sont les garants du droit, de la démocratie, du service public et d’équilibrer le bénéfice collectif et particulier. Or c’est l’inverse qui se passe, c’est l’intérêt particulier qui est fervemment défendu parce que pour être élu, il faut promettre de favoriser beaucoup trop d’intérêts particuliers. D’une manière générale que ce soit de majorité ou minorité les élus qui s’investissent donnent beaucoup de temps sans contrepartie. Malheureusement la majeure partie des citoyens qui seraient très utiles à mieux gérer l’argent public sont dans l’impossibilité de sacrifier leur temps et énergie.
Notre système ne marche pas, il est toujours en crise. Je pense qu’il faudrait que nous soyons tous formés à minima aux fonctions municipales et que comme pour les jurés, nous soyons tirés au sort. Et il ne faut pas centraliser les pouvoir sur une seule personne.
4) Quels services de l’AELO avez-vous utilisés ? Que vous ont-ils apporté ?
J’ai beaucoup appris grâce à la formation « Bien connaître ses droits d’élus d’opposition et les faire respecter », je suis novice en politique et j’ai vraiment pris conscience que les élus d’opposition sont les garants de la démocratie. Les citoyens n’ayant pas le droit d’expression directe au conseil municipal, ce sont les élus de l’opposition qui peuvent dénoncer des irrégularités dans les délibérations ou autres. J’ai notamment appris ce qu’est délibérer : débattre pour décider. Il n’y a que très peu de débat, nous délibérons sur une décision déjà prise. Je ressens une dérive, un manque de concertation, de consultation publique. Nous ne délibérons pas par exemple des sujets les plus intéressants et importants que sont la démocratie participative, l’avenir de notre commune, l’approvisionnement, la protection des ressources, les consommations énergétiques, les difficultés dans les écoles, les services municipaux, etc.
Il est difficile et ingrat d’être de la minorité. C’est être l’adversaire alors que l’on aimerait juste construire ensemble un meilleur avenir. Il est de notre devoir d’élu d’être juste. Le non-respect de la charte de l’élu devrait être immédiatement sanctionné ; l’élu local exerce ses fonctions avec impartialité, diligence, dignité, probité et intégrité.
– Publié le 20/09/21